Depuis quelques temps le gouvernement a décidé de se lancer dans un concours de trolls. Ça pourrait presque être drôle si tout ça n’était pas fait à notre compte car c’est bien avec nos impôts que sont payés les conseillers ministériels ou les députés.
Après les trolls du ministère de l’intérieur sur Wikipedia, les débats sur la façon de libeller « internet » et le clavier AZERTY français, deux députés socialistes ont eu une brillante idée : déposer un amendement pour interdire les liens hypertextes.
Rassurez-vous, le contenu de cet amendement ne concerne pas tous les liens hypertextes, mais seulement ceux qui pointent vers des pages que l’auteur ne vous aurait pas préalablement autorisé à citer.
Les deux députés à l’origine de cette brillante idée sont Karine Berger et Valérie Rabault, deux femmes qui n’ont pas du souvent naviguer sur internet ou l’internet ou les internets (on ne sait plus à ce stade).
L’ amendement n°843 au projet de loi pour une République numérique va plus loin encore, puisqu’il propose que les FAI et hébergeurs soient pénalement responsables dès lors qu’ils « donnent accès au public à des œuvres ou à des objets protégés par le code de la propriété intellectuelle, y compris au moyen d’outils automatisés ».
Interrogées à ce sujet, les députés ont expliqué ainsi leur amendement :
[Le texte vise à] protéger les créations des auteurs et préciser l’étendue de leurs droits sur les liens hypertextes […]
L’amendement appelle à redonner une protection à ces liens, en faveur des auteurs des contenus auxquels ils renvoient et les ayant droits.
Ah ben voilà on comprend mieux l’idée de cet amendement délirant : fournir des outils au législateur pour poursuivre les coupables de téléchargement ou de streaming illégaux.
Une telle mesure s’appliquerait d’ailleurs également à des services comme YouTube, Facebook, Google, Vine, etc.
Petite information pour ces deux députées qui ne sont manifestement pas bien renseignées : Facebook, Google ou Youtube sont déjà assez à cheval sur les droits d’auteur et appliquent de plus en plus rigoureusement le DMCA.
Mais pour avoir connaissance de cette information il aurait fallu aller sur l’internet et cliquer sur quelques méchants liens…
Vers une taxe sur les liens hypertextes ?
On vous rassure, face aux premiers tolés provoqués par cette proposition d’amendement, les deux députées on déclaré dans une interview au JDD qu’elles ne le soumettraient pas au vote en assemblée, et qu’il avait été proposé juste pour « susciter un débat en séance ».
Il semblerait que cette proposition soit en fait une fait un moyen détourné de remettre sur le tapis l’arrêt Svensson de la Cour de justice de l’Union européenne, qui avait jugé en 2014 que « le fait de fournir des liens cliquables vers des œuvres protégées » n’avait pas à faire l’objet d’une autorisation.
On peut donc s’attendre prochainement à un nouvel amendement pour « taxer » les liens hypertextes pointant vers des contenus protégés par le droit de la propriété intellectuelle, ou un autre délire du même acabit …